Seloua Luste Boulbina
Philosophe franco-algérienne née en 1957, ancienne directrice de programme au Collège international de philosophie, Seloua Luste Boulbina est chercheuse associée à l’université Paris Cité. Théoricienne de la décolonisation, elle a publié une douzaine d’ouvrages, privilégiant les questions coloniales et postcoloniales dans leurs dimensions politiques, intellectuelles, épistémologiques, culturelles et artistiques.
Sortir de terre, une philosophie du végétal
Zulma/Jimsaan (France/Sénégal), essai, 2025, 192 p., 17,50 €
Dans un passionnant essai, la philosophe Seloua Luste Boulbina revient sur le rapport aux plantes, donc au monde, de multiples civilisations. Une réflexion remarquable et très bien écrite sur les représentations du végétal dans la philosophie européenne, comparée aux traditions africaine et océanienne.
4e de couv : Dans la culture kanak, l’igname est à la fois consommé et vénéré. Il est symbole de vie, objet de culte, incarne les ancêtres et la lignée, est cultivé et échangé. Le cycle de l’igname procède par rhizomes : à la fois un et multiple, il n’a ni début ni fin, à l’inverse d’un règne vertical, pyramidal, hiérarchisé. Toute la cosmogonie kanak en découle, tout leur rapport au monde aussi. Et si une telle conception du végétal changeait notre relation à la terre, notre façon d’être au monde ? À la fois banal et extraordinaire, peu anthropomorphisé à la différence de l’animal, le végétal est partout – lorsque nous ne l’avons pas éradiqué de notre environnement urbain – et mu par ce mystère constamment renouvelé : il sort de terre. Il change d’état, ne meurt pas, revêt différentes formes dans une altération toujours positive, et invite à penser autrement la mort. En Occident, le végétal est fonctionnel, esthétique, symbolique : ressource alimentaire ou de pharmacopée, inspiration artistique (nature « morte » ou sculpture végétale), offrande cérémoniale, loisir ou objet de culture intensive… Seloua Luste Boulbina propose d’ouvrir notre regard, sans stigmatiser tel un anthropologue, sans classifier tel un botaniste, mais en créant du lien. Elle nous invite à une philosophie buissonnière, illustrant son propos de citations et d’oeuvres d’art, et privilégie des espaces que l’Europe n’a pas entièrement colonisés, en nous emmenant en Océanie, aux Caraïbes, en Afrique… Et si nous étions issus d’une civilisation du végétal ? Un essai novateur et vivifiant.
MÉDIAS
